« Poker menteur » en Géorgie

Josy Dubié, Sénateur Ecolo, vice-président de la commission des Affaires étrangères et de la Défense.
Le Soir, mercredi 03 septembre 2008
La Saakashvili-mania, à laquelle cèdent même certains de nos élus fédéraux qui, avec d’autres, se bousculent à Tbilissi, pour apporter leur soutien au président géorgien, a de quoi étonner.
Car, en effet, au départ de la dramatique et sanglante aventure qui vient de ravager le Caucase, il y a bel et bien l’agression soigneusement planifiée de Saakashvili de bombarder massivement, sans déclaration de guerre, en pleine nuit le 7 juillet, à coups de fusées Grad (les descendants des fameux orgues de Staline), la ville de Tskhinvali, capitale de l’Ossétie du Sud sécessionniste, faisant des centaines de victimes civiles innocentes ainsi que des soldats russes membres des forces de maintien de la paix présents sur place.
La réaction russe était donc totalement prévisible, illustrant une fois de plus le principe selon lequel « la violence entraîne la violence », dans un cercle vicieux dont Saakashvili porte l’écrasante responsabilité de l’avoir déclenchée.
Ignorer, feindre d’ignorer ou minimiser cet élément est inacceptable comme celui qui vise à affirmer que, l’Ossétie du Sud étant partie intégrante du territoire géorgien, il avait le droit d’agir de la sorte !
Curieuse manière en effet de vouloir ramener les Ossètes sécessionnistes dans le giron de la « mère patrie » en leur balançant, en pleine nuit, des centaines de fusées Grad sur la figure !
La réaction russe a, bien sûr, été violente, brutale et disproportionnée, ce dont personne, suivant quelque peu la politique internationale, ne pouvait douter au vu de la manière dont les Russes de Poutine ont écrasé et écrasent encore la Tchétchénie, niant ici le droit à l’indépendance des Tchétchènes qu’ils reconnaissent aux Ossètes et aux Abkhazes ! On n’en est plus à une contradiction près !
Il reste qu’il est logique que les Ossètes aujourd’hui, bombardés par les Géorgiens, comme les Kosovars hier par les Serbes, ne veulent plus partager de destin commun avec la « mère patrie ».
Saakashvili, principal responsable de ce merdier, est un criminel de guerre et en plus un parfait imbécile qui devrait être jugé comme tel. En lançant, en pleine nuit, sa « Blitzkrieg » le jour même de l’ouverture des Jeux olympiques, puis en occupant Tskhinvali avec ses blindés, il a joué au poker, imaginant, naïvement, créer un fait accompli, et entraîner le « monde libre » (sic) dans sa croisade nationaliste. Il a joué, il a perdu, mais ceux qui ont vraiment perdu, ce sont d’abord les centaines de victimes innocentes, dans les deux camps, de cette guerre absurde. Il ne faudrait cependant pas croire que Saakashvili a agi sur un coup de tête. Son agression est planifiée depuis longtemps, comme le démontrent les quantités énormes de matériel militaire ultrasophistiqué que lui ont fourni les EU et Israël, ainsi que la présence confirmée de conseillers militaires américains et israéliens. La Géorgie est d’ailleurs, après Israël, le principal bénéficiaire de l’aide militaire américaine. Échange de bons procédés, la Géorgie de Saakashvili, est, en regard de la taille de sa population, avec deux mille soldats déployés en Irak, le principal contributeur à cette guerre illégale. Cela explique sans doute le soutien sans faille que prodiguent certains à ce fauteur de guerre, à commencer par le président G. W. Bush.
Il est piquant, par ailleurs, d’entendre les cris d’orfraie des « Occidentaux » qui condamnent la reconnaissance par Moscou de l’indépendance des petites républiques d’Ossétie du Sud et d’Abkhazie alors qu’il ne s’agit ni plus ni moins que de « la réponse du berger à la bergère ».
En effet, le « respect du droit international » (sic) dans lequel se drapent Américains et Européens a été allégrement violé il y a peu par les États-Unis et leurs suivistes, dont la Belgique, en reconnaissant l’indépendance illégale du Kosovo, puisque la résolution 1244 du conseil de Sécurité prévoyait « pour le Kosovo une autonomie substantielle, qui tienne pleinement compte (…) du principe de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de la République fédérale de Yougoslavie et des autres pays de la région » (1999).
Violemment critiquée par la Russie, alliée traditionnelle de la Serbie, la reconnaissance de l’indépendance du Kosovo a ouvert, comme je l’avais dénoncé alors au Parlement, une boîte de Pandore qui n’est, malheureusement, pas près de se refermer. En effet, au nom de quelle logique peut-on refuser aujourd’hui aux Ossètes et Abkhazes, qui se sont massivement prononcés démocratiquement pour l’indépendance hors de la Géorgie, ce que l’on a accordé hier, illégalement, aux Kosovars qui ne voulaient plus, eux non plus, massivement, faire partie de la Serbie ?
Dans cette partie qui se joue dans le Caucase, les Russes jouent sur du velours car ils ont toutes les cartes en main. Celui qui les leur a données, c’est ce piètre stratège et joueur de poker qui s’appelle Saakashvili que certains veulent pourtant remettre en selle. Il reste à espérer que les Géorgiens, lorsqu’ils mesureront enfin le désastre dans lequel les a plongés le sanglant aventurisme de leur président (que le monde entier a vu, complètement hagard mangeant sa cravate), s’en débarrasseront démocratiquement et au plus vite.
On ne peut en tout cas que se féliciter que certains pays, dont la Belgique, aient refusé récemment l’adhésion de la Géorgie à l’Otan car nous aurions pu, si la Géorgie avait fait partie de l’Alliance, être entraînés dans cette aventure de poker menteur nationaliste, tant il est vrai que peu de nos compatriotes se sentent prêts à mourir pour Tskhinvali !
Nous devons tout faire aujourd’hui pour calmer le jeu, enrayer l’escalade et refuser de jeter de l’huile sur le feu, et, en tout cas, refuser de jouer dans la pièce qu’on nous prépare de la relance de la course aux armements pour contrer le « nouvel impérialisme russe » (sic). Quand on botte le cul d’un ours on ne doit pas s’attendre à ce qu’il vous baise la main !
- Блог пользователя Voix de Russie
- Войдите или зарегистрируйтесь, чтобы отправлять комментарии
- 817 просмотров