LE MARCHE DES VALEURS RUSSE BAT TOUS LES RECORDS

Nina Koulikova, commentatrice économique de RIA Novosti

Le marché des valeurs russe croît à un rythme vertigineux: l'indice RTS a progressé d'environ 60% depuis le début de l'année, et près de la moitié de cette croissance tombe sur l'été et le mois de septembre.
Au troisième trimestre, l'indice RTS s'est envolé de 40% accusant le rythme de croissance le plus élevé parmi les 79 principaux indices boursiers du monde surveillés par l'agence Bloomberg. Récemment, il a franchi la barre des mille points. Selon le vice-premier ministre Alexandre Joukov, la capitalisation boursière de l'ensemble des entreprises industrielles russes a atteint 410 milliards de dollars.
Pour expliquer ce rythme effréné, les experts citent en premier lieu les prix élevés du pétrole et des produits pétroliers qui se répercutent directement sur le marché des valeurs. L'intérêt des investisseurs étrangers ne diminue pas pour le secteur pétrolier russe et pour la prochaine libération des actions de Gazprom. En effet, les entreprises du pétrole et du gaz sont en tête du classement du marché des valeurs national.
La stabilité macro-économique intérieure et le remboursement anticipé d'une partie de la dette russe envers le Club de Paris exercent également une influence positive. Résultat, les agences de notation révisent à la hausse les notes et les perspectives de beaucoup de compagnies, et celles-ci réalisent avec succès des introductions en bourse sur les marchés occidentaux.
Apparemment, les investisseurs constatent une baisse des risques politiques intérieurs, et les craintes suscitées par l'affaire Yukos s'effacent peu à peu. Certains experts dénoncent cependant le facteur de la demande différée des actions russes. Sans l'affaire Yukos, le RTS aurait pu accéder plus tôt à la barre des mille points.
Selon Olga Belenkaïa, analyste à Finam, le relèvement à mille points de l'indice RTS est un signe positif pour le marché national, car il témoigne d'une meilleure attractivité des compagnies russes aux yeux des investisseurs aussi bien intérieurs qu'extérieurs. Pour le président de la bourse RTS, Oleg Safronov, cette hausse signifie que les investisseurs ont intérêt à acquérir des actifs russes et, donc, font grand cas des perspectives de l'économie russe dans son ensemble.

S'agissant des perspectives du marché russe des valeurs, certains experts s'attendent à ce que la croissance fulgurante du RTS soit suivie d'un ralentissement. "Les perspectives du marché des valeurs russes sont bonnes, dit Olga Belenkaïa. La croissance du RTS s'est accélérée ces derniers temps, rien que depuis le début de l'année il a gagné 60%. Un réajustement technique n'est donc pas à exclure". Par contre, Sergueï Souverov, de Gazprombank, souligne que le marché des valeurs n'est nullement surchauffé et que "nous n'atteignons pas le chiffre d'affaires d'autres marchés en développement". À son avis, mille points représentent, certes, un jalon important, mais pas un plafond.
Il reste cependant que les succès du marché des valeurs ont peu d'importance pour les simples gens. Si en Occident une partie significative de la population place ses économies dans les valeurs boursières, les Russes continuent de plébisciter les dépôts bancaires et les bas de laine. Selon les experts, le marché des valeurs demeure peu populaire parmi les investisseurs privés parce que la population en est insuffisamment informée. Les Russes ne savent pratiquement rien des mécanismes boursiers. Il n'y a presque pas en Russie de sociétés ouvertes dont l'objectif est d'augmenter leur propre valeur. La croissance de l'indice RTS, quoique appréciée par les analystes, a peu d'incidence sur les revenus de la majorité. Or, le potentiel des investissements privés n'est que trop grand: selon la Banque de Russie, la population détient près de 27 milliards de dollars. Un énorme travail incombe donc à la bourse RTS et à ses acteurs.