LES EVENEMENTS DE KONDOPOGA ONT MIS A NU DE NOMBREUX PROBLEMES

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Par Vassili Ivanov, RIA Novosti

Ce qui s'est produit à Kondopoga, ville de Carélie, est un événement extraordinaire d'envergure nationale. Comme cela arrive ordinairement, tout a commencé par un incident banal. Dans la nuit du 29 au 30 août, une bagarre a éclaté dans un restaurant de la ville, le Tchaïka. C'est aux enquêteurs d'éclaircir les circonstances, mais la bagarre a pris rapidement un caractère tragique et massif. Deux habitants locaux, Sergueï Oussine et Grigori Slizov, ont été tués.

La bagarre à opposé les habitants locaux aux Caucasiens (des Tchétchènes), ce qui a servi de détonateur à d'autres événements. Un conflit interethnique d'ampleur nationale a éclaté dans la ville. Seule l'arrivée de l'OMON (police anti-émeute) a pu apaiser les passions, mais les autorités craignaient et redoutent toujours que les troubles ne s'étendent à toute la république. Au bout de quelques jours, plusieurs échoppes tenues par des Caucasiens ont été saccagées, le restaurant Tchaïka tenu par des Tchétchènes et où a eu lieu le meurtre a été incendié à plusieurs reprises. Des pillages ont lieu la nuit dans la ville. Voulant profiter du conflit et des troubles, le monde du crime s'emploie à les stimuler de nouveau. Le préjudice causé est considérable à l'échelle locale: il s'agit de biens, d'affaires rentables, de millions de dollars.

Les événements de Kondopoga se sont entremêlés en un véritable écheveau. Les meetings spontanés rassemblent de nombreux habitants qui réclament le départ des Caucasiens de la ville. En même temps, la diaspora tchétchène locale ne reste pas les bras croisés et sonne l'alarme. Les habitants de la Tchétchénie et les hommes politiques tchétchènes essaient de participer au règlement du conflit, en devançant les membres de la Chambre civile et les députés de la Douma (chambre basse du parlement russe) qui se rendent en hâte à Kondopoga. Le président de la République de Tchétchénie Alou Alkhanov et le président du gouvernement tchétchène Ramzan Kadyrov font des déclarations sérieuses. Le problème se complique du fait que la Tchétchénie vient de sortir d'une guerre civile, elle abonde en armes et en têtes brûlées prêtes à se précipiter à Kondopoga afin d'y "mettre de l'ordre".

Il faut tout de même reconnaître un certain mérite aux Tchétchènes: leur diaspora locale a livré aux autorités de la ville trois Tchétchènes suspectés d'avoir tué les habitants locaux, ce qui a facilité la tâche des autorités républicaines qui s'efforcent d'éteindre le conflit. Certes, il n'a pas surgi de rien, il couvait depuis longtemps. Les autorités ont fermé le restaurant Tchaïka et promettent d'évincer les Caucasiens du marché de Kondopoga pour l'accorder aux entrepreneurs locaux.

Les événements de Kondopoga sont un cas sans précédent pour la Russie. Bien que les conflits interethniques n'y soient pas rares, il ne s'est jamais rien produit d'aussi grave. Les hommes politiques russes répètent sans cesse que la Russie est un pays multinational et multiconfessionnel, c'est pourquoi il faut y appliquer une politique réfléchie et prudente à l'égard des nationalités. Après Kondopoga, on peut dire que malgré la justesse de ces paroles, les autorités russes ont une conception assez floue de cette politique. Ils agissent au hasard, à l'improviste, en essayant de trouver des issues à une situation très complexe. La confrontation des intérêts commerciaux, les frictions interethniques, les graves problèmes sociaux, le manque de confort et le mécontentement d'un nombre immense d'habitants ont pour conséquence que les citoyens de la Russie de diverses nationalités en arrivent parfois à s'affronter physiquement.